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50 ans de mutations de l’emploi.

jeudi 21 octobre 2010

l’INSEE vient de publier une synthèse sur les mutations de l’emploi depuis 1960. (http://www.insee.fr/fr/ffc/ipweb/ip1312/ip1312.pdf).

Lorsque l’on parle mutations de l’emploi et que l’on compare avec ce qui est parfois présenté comme l’âge d’or des années 60, on met l’accent d’abord sur le niveau du chômage (10% contre 2% il y a 50 ans), la montée des emplois précaires (15 % aujourd’hui) ainsi que les temps partiels (18 % aujourd’hui), avec toutes les répercussions sur les rémunérations, les niveaux de vie et la pauvreté qui peut en résulter. D’autres bouleversements se sont imposés en en 50 ans.

Au début des années 60, la France est un pays d’ouvriers (39%), de paysans (16%) et d’indépendants, artisans, commerçants, patrons de PME et TPE (11%). Le monde des employés, des professions intermédiaires et des cadres supérieurs ne représente qu’un tiers. A la fin des années 2000, cette France d’ouvriers et de paysans a disparu. Il ne reste plus que 2% d’agriculteurs, les ouvriers représentent moins d’un quart et dans leur majorité ils ne sont plus dans l’industrie. Les artisans et commerçants ont fondu comme neige au soleil (6%). Par contre les professions tertiaires ont explosé : les cadres ont vu leur pourcentage tripler (de 5 à 16%), les professions intermédiaires ont plus que doublé (11 à 25%), les employés ont progressé de plus de la moitié (plus de 28% aujourd’hui). Cette transformation socioprofessionnelle des emplois est allée de pair avec la mutation sectorielle des activités : recul de l’agriculture qui n’occupe plus que 3% des actifs occupés ; déclin de l’industrie qui voit son poids dans l’emploi divisé par 2 pour ne représenter plus que 15%, mouvement amorcé d’ailleurs dès la fin des années 60. Alors que le secteur tertiaire, certes vaste fourre-tout, qui regroupait encore moins de la moitié des emplois il y a 50 ans, compte aujourd’hui 3 emplois sur 4. Quatre dimensions qualitatives ont accompagné ces transformations.

Tout d’abord la salarisation de la population active. Si un peu plus des 2 tiers des emplois étaient des emplois de salariés au début de la période, aujourd’hui, c’est 9 sur 10, le travail indépendant résistant autour de 7 %. Deuxième dimension, le niveau de diplôme. Au début des années 60, plus des 3 quarts des personnes employées n’avaient aucun diplôme et au mieux un CEP, aujourd’hui c’est le cas d’une personne sur 6 ! Tous les autres niveaux de diplômes, issus de la formation initiale, ont explosé : le pourcentage de ceux qui sont égaux ou supérieurs au baccalauréat est passé de 8,5 % à 51 %, 6 fois plus ; . Le plus spectaculaire : les diplômés du supérieur qui représentaient moins de 3% en 1962 ont été multipliés par 10. Troisième donnée et pas des moindres, la féminisation des emplois. En 1962 le nombre de personnes occupant un emploi était de l’ordre de 19 millions dont les deux tiers étaient des hommes. En 2007, il avoisine 26 millions, se partageant à parts presque égales entre hommes et femmes (53%-47%). Et encore ces données minimisent l’ampleur des changements dans la mesure où une majorité des femmes ayant un emploi dans les années 60 étaient des femmes (ou des filles) d’agriculteurs ou d’indépendants. La contribution des femmes à la salarisation et à la tertiarisation des emplois a été essentielle. Dernier repère majeur : le vieillissement de la population ayant un emploi. La part des moins de 30 ans baisse depuis le milieu des années 70 – du quart à moins du cinquième de l’emploi -, sous le triple effet du ralentissement démographique, de l’allongement de la scolarité et bien évidemment aussi, du chômage des jeunes. Si les trentenaires représentent un quart hier comme aujourd’hui, les quadragénaires ont vu leur poids augmenter sensiblement (28% actuellement) et les seniors de plus de 50 ans, dont le pourcentage avait baissé fortement jusqu’au début des années 90 (de 32 à 19%) représentent aujourd’hui plus d’un quart des emplois.

Ces données pour grossières qu’elles soient, n’en donnent pas moins un aperçu essentiel sur les mutations de l’emploi. Mutations qui sont le reflet des transformations économiques mais aussi socioculturelles, professionnelles et de genre qu’a connues la société française durant ce demi-siècle. C’est bien à l’aune de ces bouleversements que doivent être pensées (ou repensées) les politiques de l’emploi, de la formation initiale ou continue, les politiques de réduction de la précarité et des inégalités, comme celles de protection sociale.