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La syndicalisation des jeunes, casse-tête syndical, selon un rapport du CNAM

samedi 7 septembre 2019

La syndicalisation des jeunes est un véritable défi pour les organisations syndicales alors que la sortie des études et l’arrivée dans un emploi stable est de plus en plus tardive. Comment les syndicats s’y prennent-ils ? Quels moyens se donnent-ils ? En font-ils réellement une priorité ? C’est à ces questions qu’une équipe de chercheurs du CEET – CNAM a tenté de répondre.

La syndicalisation des jeunes

Selon les chiffres du ministère du Travail, 5 % des moins de 35 ans sont syndiqués alors que pour l’ensemble des salariés le taux de syndicalisation est de 10 %. CGT et CFDT confirment ce constat en estimant que les moins de 25 ans représentent 2 % des adhérents, les moins de 30 ans 5 ou 6 % et les moins de 35 ans environ 10 %.

L’allongement de la scolarité et l’augmentation de la précarité avant d’accéder à un emploi stable expliquent pour une grande part cette sous-syndicalisation des jeunes. Au-delà de ces questions structurelles, mais aussi de quelques autres liées à l’image du syndicalisme vis-à-vis des jeunes que le rapport n’aborde pas, les auteurs se sont concentrés sur les moyens mis en œuvre par les organisations pour attirer les jeunes, les faire accéder à des mandats et des responsabilités. La recherche s’est concentrée sur l’étude des politiques syndicales de cinq organisations syndicales : CFDT, CGT, FO, UNSA et Solidaires.

Des dispositifs mis en place mais des structures fragiles et en manque de légitimité

Toutes les organisations ont mis en place des dispositifs qui s’adressent aux jeunes mais ils restent peu visibles selon les auteurs. Ce sont en général des moyens mis en œuvre au niveau confédéral ou national. Ils sont aussi déclinés au niveau des branches professionnelles ou au niveau des territoires. Leur poids politique ou leurs moyens restent toutefois relativement faibles. Ils s’adressent plus généralement aux salariés de moins de 35 ans. Certains syndicats abordent ces politiques avec des réticences. Les rapporteurs constatent de fait un grand décalage entre « la visibilité acquise par les enjeux de féminisation » et la « faible place consacrée à la problématique jeune ». Deux explications avancées : peur de « redoubler les effets discriminatoires des dispositifs d’action publique » ; crainte des responsables existants plus âgés de voir leur position mise en cause avec l’arrivée de nouveaux militants.

Des différences entre organisations existent toutefois dans l’importance des moyens accordés à la problématique jeunes. Ce sont les trois grandes confédérations qui ont les politiques les plus élaborées. Les structures et les moyens mis en place ont une certaine ancienneté même s’ils ont évolué dans le temps.

Ainsi, dès 1968, la CGT a institué le Centre Confédéral de la jeunesse rebaptisé depuis 2003 « Jeunes CGT ». Les collectifs « jeunes » ont un organigramme bien précis avec un collectif confédéral qui se réunit tous les mois qui peut désigner un représentant au Comité National Confédéral. Leur pouvoir reste malgré tout faible.

La CFDT a une commission confédérale jeunes depuis 1964. Depuis, la question de la syndicalisation des jeunes a toujours été au rang des préoccupations des responsables CFDT. Depuis de nombreuses années maintenant, il existe au niveau confédéral une « délégation jeunes » qui est occupée aujourd’hui par deux permanents confédéraux. De plus, une secrétaire nationale, par ailleurs jeune de 35 ans, est chargée de la politique confédérale en direction des jeunes. La CFDT organise de nombreuses initiatives dont régulièrement des rassemblements en direction de nouveaux adhérents voire des sympathisants. Ainsi, le 1er mai 2015, a été organisé le « working time festival » (WTF), sous forme de forum avec un mélange d’informations pratiques, d’espaces ludiques et de renseignements sur l’univers syndical. Loin de la crainte exprimée par les auteurs d’une sorte d’opération de communication, ce rassemblement qui a été un succès venait ponctuer tout un travail réalisé par la confédération depuis 2010 pour que l’organisation soit plus en phase avec la composition sociologique de la société et permette à des jeunes de s’impliquer et prendre des responsabilités dans l’organisation.

Quant à FO, si une instance confédérale réunit régulièrement les correspondants des comités jeunes locaux, il n’y a pas de reconnaissance statutaire de l’activité jeunes.

Plus largement, les auteurs notent que les structures en charge de la politique jeune ont du mal à se stabiliser, qu’elles ont peu de poids politique dans l’organisation et disposent d’une autonomie financière relativement limitée.

La syndicalisation des jeunes : une préoccupation réelle mais difficile à mettre en œuvre

Les résolutions de congrès ne manquent pas à ce sujet mais leurs traductions concrètes passent difficilement le stade de la réflexion. Il en va ainsi d’une déclaration forte de la CGT dans sa résolution du congrès de 2013 et suivie en interne d’une réflexion importante pour en faire une préoccupation de toute l’organisation et pas seulement sous-traitée par les collectifs « jeunes CGT ». De son côté, la CFDT a adopté en 2014 la possibilité d’une adhésion spécifique à prix réduit pour les jeunes.
Pour FO c’est devenu une préoccupation récemment du fait des nouvelles règles en matière de représentativité suite à la loi de 2008.

Plus largement c’est au travers de politiques d’informations ciblées (apprentis, saisonniers, travailleurs précaires) que les confédérations ont mis en œuvre leur politiques de syndicalisation des jeunes. Elles ont aussi développé des rapports avec les organisations étudiantes (Unef pour la CGT et FO) avec même des tentatives de création de syndicat étudiant comme la Confédération étudiante (Cé) entre 2003 et 2013 pour la CFDT (qui s’est ensuite rapprochée de la FAGE) et celle de Sud-Etudiant par Solidaires.

Même si les moyens mis en œuvre ou l’importance accordée par les organisations peuvent paraître insuffisants, il n’en reste pas moins que les organisations syndicales ont pris la mesure des enjeux de la syndicalisation des jeunes pour leur avenir dans un contexte de vieillissement des effectifs syndicaux. Manifestement, les organisations n’en sont pas au même degré de réflexion et d’action. De ce point de vue, la CGT et encore plus la CFDT ont une longueur d’avance sur les autres centrales syndicales. Pour cette dernière, sa volonté de faire évoluer l’organisation pour être plus représentative des différentes catégories de salariés, et pour cela entre autres actions de donner leur place aux jeunes a été actée dès 2010 au congrès de Tours et réaffirmée et amplifiée lors des congrès qui ont suivi (Marseille en 2014 et Rennes en 2018). C’est la condition première pour être plus en phase avec les évolutions de la société et mieux répondre aux attentes des salariés.
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