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Les compétences en France : des manques et des problèmes d’adéquation

mercredi 17 janvier 2018

Alors que les projecteurs se braquent en ce début 2018 sur les négociations sociales d’envergure de la formation professionnelle et de l’assurance chômage, un rapport de l’OCDE [1] du 14 décembre 2017 relève que le manque de compétences et l’inadéquation entre l’offre et la demande d’emplois pénalisent fortement le marché du travail français et que cette situation pourrait même s’aggraver. Le rapport pointe les problèmes importants de pénurie dans les secteurs de l’informatique, l’électronique, la mécanique ou l’enseignement et la formation, le management mais également dans les compétences plus transversales.

Une situation paradoxale : une reprise de l’activité et un manque de compétences

Il est indéniable que les signaux économiques de la France se sont améliorés tout au long de l’année 2017 et que les prévisions 2018 sont bonnes. Les entreprises signalent un climat des affaires plus favorable mais dans le même temps on constate un chômage qui reste élevé, particulièrement chez les jeunes et les seniors et une pénurie de compétences ou des problèmes d’adéquation entre les offres et les demandes d’emploi. Le manque ou/et la sous-utilisation des compétences pourraient être des facteurs importants pour expliquer la persistance de ce chômage bien supérieur à de nombreux voisins européens. Depuis plusieurs années Pôle emploi et l’Unédic soulèvent ce problème.

L’économiste Jean Pisani-Ferry, lors du dernier Grand-rendez-vous Les Echos, s’est montré inquiet des difficultés de recrutement déjà rencontrées par les entreprises et qui « se situent au même niveau qu’en 2007 alors que l’on avait un taux de chômage 2 points plus bas ». Selon l’Insee, 32 % des entreprises disent rencontrer une indisponibilité de main-d’œuvre compétente.
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Des jeunes sans compétences

Pour l’organisation internationale, un des principaux problèmes est que, si le niveau d’études en France s’approche de la moyenne des pays développés, les tests d’évaluation des compétences signalent que « la part des jeunes adultes ayant un faible niveau de compétences élémentaires y est plus élevée que dans la plupart des autres pays de l’OCDE ». De plus, les jeunes sont nombreux à occuper des emplois temporaires, qui leur offrent peu de perspectives d’emploi à long terme et de possibilités de formation.

Des problèmes aussi pour les adultes

L’examen du niveau des compétences de la population adulte est aussi alarmant pour l’OCDE. Selon les chiffres de l’évaluation de compétences des adultes (PIAAC), sur les 24 pays participant à l’enquête, « la France se classe parmi ceux où les performances à l’écrit et en mathématiques sont les plus faibles » et ce essentiellement pour la tranche d’âge des 45-65 ans. Ce plus faible niveau de compétences des personnes plus âgées s’explique par « un effet d’âge, c’est-à-dire par la détérioration des compétences, lié au vieillissement et par le fait que le niveau de formation des seniors est plus faible ».

Les experts soulignent enfin que l’offre de formation proposée aux adultes est « limitée, en particulier pour les personnes ayant de faibles compétences ». En France, seulement 32 % des adultes ont suivi une formation liée à l’emploi au cours des 12 derniers mois (12 % pour les adultes peu qualifiés), contre plus de 55 % dans certains pays européens comme le Danemark, la Norvège et la Finlande, ainsi qu’en Nouvelle-Zélande.

Le problème de l’adéquation

En France, la mise en adéquation de l’offre et de la demande de compétences sur le marché du travail est problématique. 35,1 % des salariés français font un métier pour lesquels ils n’ont pas de qualification adéquate. 23,4 % des salariés exercent un métier pour lequel un niveau de qualification plus élevé est normalement exigé, autrement dit, ils sont sous-qualifiés pour ce métier. Et enfin, 11,7 % d’entre eux exercent un métier qui requiert un niveau de qualification inférieur. En d’autres termes, ils sont surqualifiés.
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Les immigrés représentent en outre un vivier considérable de compétences non ou sous-utilisées, leurs taux de chômage et de surqualification étant supérieurs à la moyenne.

Les plus grandes pénuries de compétences

Les plus grandes pénuries de compétences se trouvent dans l’enseignement et la formation, l’informatique et l’électronique, l’ingénierie et le domaine des technologies, mais aussi dans des domaines de compétences plus transversales comme les aptitudes à l’oral, la résolution de problèmes complexes et le management.

Comment améliorer la situation ?

Face à ces problèmes, l’organisation internationale recommande à la France d’améliorer l’égalité d’accès à un enseignement et une formation de qualité. Ils souhaitent que la France aille plus loin sur l’enseignement professionnel et qu’elle renforce l’apprentissage. Les spécialistes préconisent « d’adapter le contenu des programmes d’enseignement professionnel afin qu’il soit davantage en adéquation avec les besoins des employeurs ». Ils recommandent également aux enseignants « de suivre en permanence l’évolution des pratiques en entreprise ». Enfin, les experts proposent d’élargir l’enseignement professionnel à plus de secteurs, « et surtout aux secteurs émergents ».

Le rapport est aussi sévère avec les services d’orientation des établissements scolaires. Il regrette que « l’information relative à l’orientation professionnelle reste souvent éparpillée et sans lien avec les besoins du marché du travail répertoriés par d’autres acteurs ».

Un compte personnel de formation plus simple

L’organisation déplore que les adultes les moins qualifiés n’utilisent pas assez ce dispositif et, pour les inciter à l’utiliser, l’OCDE conseille « d’en simplifier les modalités ». Enfin, l’OCDE est critique à l’égard de la qualité des formations proposées dans le cadre de ce dispositif. Il conseille donc de limiter les programmes de formation proposés à seulement ceux qui ont reçu une certification spécifique.

Nul doute que ces orientations pourraient servir à alimenter les réflexions des négociateurs et des services de l’État.


Sources


Notes :

[1Coopérant avec plus d’une centaine de pays, l’OCDE est un forum stratégique international qui œuvre à promouvoir des politiques conçues pour améliorer le bien-être économique et social des citoyens dans le monde entier.