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Où en est l’autonomie dans le travail ?

mercredi 12 juin 2019

Le travail se transforme très rapidement. Les salariés souhaitent de plus en plus la reconnaissance de leur travail et des compétences qu’ils y apportent. Les réformes actuelles, notamment celle de la formation, veulent qu’ils soient acteurs de leur devenir. En même temps beaucoup d’entreprises maintiennent des organisations du travail rigides, non participatives, avec les logiciels prescriptifs, des procédures lourdes et des reportings permanents. Où en est, avec ces paradoxes, l’autonomie réelle des salariés dans leur travail ?

Comment la définir ?

Une bonne définition est donnée par le Collège d’expertise sur le suivi des risques psychosociaux au travail : l’autonomie au travail consiste en la possibilité pour le salarié d’être acteur dans sa participation à la production et dans la conduite de sa vie professionnelle. Elle inclut la marge de manœuvre dont dispose le travailleur dans son travail, sa participation dans la prise des décisions qui le concernent et également l’utilisation et le développement de ses compétences.

Sans cette autonomie, les situations de tension avec de fortes exigences et une faible latitude sont à craindre, engendrant l’ennui (bore-out), des risques pour la santé physique et mentale, un enfermement dans un emploi peu qualifié et une diminution de la qualité de vie hors travail.

Ce Collège distingue plusieurs niveaux dans l’autonomie :
 dans la tâche elle-même : je peux influencer le déroulement du travail ;
 dans la possibilité d’anticipation du travail : je sais ce que j’aurai à faire le mois prochain ;
 dans l’utilisation et l’accroissement des compétences : j’ai besoin de hautes compétences, je dois apprendre des choses nouvelles.

13 critères de l’autonomie au travail

Pour analyser l’autonomie d’un salarié dans son travail, la Dares a déterminé des résultats de son enquête « Conditions de travail – Risques psychosociaux de 2016 » 13 éléments qui participent à la constitution de cette autonomie :

LES 13 CRITERES


 La possibilité d’interrompre momentanément son travail ;

 Savoir ce qu’on attend de vous au travail ;

 Les indications données par les supérieurs hiérarchiques : seulement l’objectif ou très prescrit ;

 L’application des ordres, consignes, modes d’emploi : stricte ou non ;

 Le comportement en cas d’incident : qui le règle ?

 La possibilité de faire varier les délais fixés ;

 Celle d’organiser son travail ;

 La nécessité de prendre des initiatives au travail ;

 L’ennui au travail ;

 La possibilité de faire des choses plaisantes ;

 La possibilité de mettre en pratique des idées ;

 Le travail permet d’apprendre des choses nouvelles ;

 La possibilité de développer ses compétences.

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Une bonne grille de lecture de son autonomie dans le travail !

Les réponses des salariés à cette enquête sont d’ailleurs loin d’être pessimistes. La majorité des réponses à ces questions est positive. Quelques exemples : 83 % disent pouvoir organiser leur travail, 70 % l’interrompre momentanément, 77 % prendre toujours ou souvent des initiatives au travail, 66 % avoir la possibilité de mettre en pratique toujours ou souvent leurs idées, 80 % apprendre des choses nouvelles et 68 % développer leurs compétences.

Mais si l’on creuse un peu, l’enquête est très détaillée, on constate des différences nettes dans les réponses :

  • Selon la catégorie professionnelle : l’enquête confirme que les cadres et les professions intermédiaires ont des réponses montrant beaucoup plus d’autonomie que les employés et ouvriers ;
  • Selon le sexe : plus d’autonomie pour les hommes que chez les femmes ;
  • Selon l’âge également : le travail est prescrit beaucoup plus précisément aux jeunes salariés ; l’autonomie se développe peu à peu ensuite ;
  • Selon les années : le dispositif d’enquête étant suivi sur 25 ans, on voit que certaines prescriptions se renforcent, comme pour le règlement des incidents, la précision des délais, et que l’autonomie a grandi sur d’autres aspects telles l’interruption momentanée du travail, les indications hiérarchiques, la possibilité d’organiser son travail, de prendre des initiatives, de faire des choses plaisantes, d’apprendre des choses nouvelles et de développer ses compétences.
  • Selon les types d’employeur, entre public et privé et entre les 3 fonctions publiques. L’interruption momentanée est plus difficile dans la fonction publique, les indications des supérieurs sont plus précises ; l’application des ordres est plus demandée dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière et on y met moins ses idées en pratique… L’autonomie dans l’hospitalier public est limitée en cas d’incident, comme pour organiser son travail, et on prend moins d’initiative dans les emplois territoriaux.

Le Collège d’expertise rappelle que cependant l’autonomie peut être vécue négativement et devenir un risque :

  • Si l’intensité du travail est trop forte ;
  • Si la latitude décisionnelle lie étroitement travail, résultats professionnels et évolution de carrière, ce qu’on trouve par exemple fréquemment dans la gestion par projets ;
  • Si l’autonomie n’est pas associée au développement des compétences.
L’ensemble de ces éléments montre ainsi qu’il s’agit d’une condition fondamentale dans la qualité de la vie au travail, qui est encore peu souvent explicitée, discutée, encore moins négociée. C’est pourtant un thème important de dialogue social à prendre en charge dans les entreprises et administrations.

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Sources