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L’emploi des travailleurs handicapés, un bilan en évolution

vendredi 8 décembre 2023

En 2022, 38 % des travailleurs reconnus handicapés ont un emploi et leur taux de chômage est de 12 %. C’est le signe d’une amélioration dans les dernières années mais cela montre aussi que le problème est loin d’être résolu. Les publications récentes de la Dares et du Cereq permettent d’en appréhender les facteurs principaux et d’en faire le bilan.

Les caractéristiques de l’emploi handicapé

2.9 millions de travailleurs en France sont reconnus comme travailleurs handicapés ; c’est 7,1 % des personnes en âge de travailler (15-64 ans). Cependant ils ne représentent que 4 % des personnes en emploi car seulement 44 % d’entre eux sont en activité (contre 74 % de la population totale) et 38 % en emploi (1,1 million). Aussi ils gardent un taux de chômage bien supérieur au taux global : 12 % en 2022 contre 7,1 % pour la population active (PA) totale, et de plus longue durée moyenne.

D’autre part, l’emploi handicapé garde des caractéristiques particulières :

  • des travailleurs en moyenne plus âgés : la moitié sont entre 50 et 64 ans (31 % pour l’ensemble de la population active).
  • ils sont en moyenne moins diplômés, si bien qu’ils occupent surtout des emplois d’employés (35 %, contre 26 % de la PA), d’ouvriers (27 %, contre 19 %) ; moins souvent cadres (10 %, contre 22 %).
  • Ils sont plus souvent à temps partiel : 1/3 (contre 17 % PA), beaucoup pour des raisons de santé ou de handicap, si bien que 15 % étaient en arrêt maladie la semaine de l’enquête de la Dares (contre 4 % de la PA) en 2022.

Un mieux dans l’emploi handicapé entre 2015 et 2022

Malgré tout, le taux de chômage des travailleurs handicapés est en nette amélioration, passé de 17 % en 2015 à 12 % en 2022 (hommes : 11 %, femmes : 13 %).

  • Ce progrès se fait de 2015 à 2019 au même rythme que pour l’ensemble de la population active : leur taux de chômage baisse à 15 %.
  • Mais ensuite entre 2020 et 2022, le mouvement faiblit, leur taux d’activité recule et n’a pas encore retrouvé en 2022 son niveau de 2019 (-0,8 point), alors qu’il a augmenté de 1 point pour la population totale. Deux facteurs interviennent. D’une part, population plus souvent âgée, elle est peu touchée par l’essor de l’apprentissage qui a augmenté l’emploi. Mais surtout, plus sensibles aux risques du covid-19, cette population a connu plus de retraits d’activité. Ce dernier facteur participe à expliquer que l’on ait, au cours de ces 3 dernières années, un taux d’emploi qui augmente (+0,8 point) et une forte baisse du taux de chômage des travailleurs handicapés, passant de 15 à 12 %.
  • Cependant, leur retrait en phase de Covid-19 semble s’arrêter et les projections de la Dares pour le 1er semestre 2023 misent sur un rattrapage de l’activité et même une hausse jusqu’à 45,4 % des handicapés vivant en situation ordinaire, ce qui a pour effet une légère augmentation du chômage à 12,3 %. Cela sera à suivre de près vu le ralentissement économique et de la création d’emplois tout au long de l’année.

L’expérimentation de la formation inclusive

Il reste cependant que le taux de chômage handicapé est actuellement bien supérieur au taux général, en raison d’abord de la frilosité des entreprises qui n’ont un taux d’emploi de travailleurs handicapé que de 4 %, avec pourtant une obligation à 6 %. Le deuxième problème est celui de la qualification souvent limitée de ces personnes, ce qui pose donc un problème de formation. On connait les insuffisances de leur intégration dans la formation initiale…

Pour la formation professionnelle des handicapés demandeurs d’emploi existent 2 possibilités :

  • soit ils peuvent entrer dans un organisme de formation de droit commun, si leur handicap le leur permet, avec des aides sous forme de prestations d’appui spécifiques ;
  • soit, si leur handicap les limite davantage, ils peuvent intégrer un établissement ou service de réadaptation professionnelle (79 ESRP), où ils bénéficient à la fois de formateurs et de personnel médico-social, pour 200 formations qualifiantes.

La recherche d’une possibilité innovante de formation a permis de créer en Normandie une expérimentation, appelée à diffuser, le « dispositif de formation accompagnée ». Là où les 2 systèmes existants identifiaient les travailleurs handicapés en deux groupes, selon le poids de leur handicap, cette expérimentation les associe, avec une formation dans un organisme de formation ordinaire et un accompagnement hors les murs par des professionnels médico-sociaux des ESRP, pour un public plus vulnérable pour être seulement accueilli dans un organisme de droit commun mais suffisamment autonome pour ne pas avoir besoin d’être en ESRP.

L’expérimentation a besoin d’être poursuivie pour aller au-delà d’un petit nombre de participants, pour s’adapter aux différences d’approches des départements et des différents acteurs du handicap, pour aller plus loin dans l’individualisation des formations, inciter à des formations plus variées et visibiliser l’accompagnement avec les organismes de formation, mais le Cereq souligne l’intérêt de l’accompagnement individualisé réalisé auprès de ces travailleurs handicapés.

On voit ainsi que des progrès se réalisent, mais que le taux de chômage de ce public montre que les entreprises ne se tournent pas suffisamment vers des recrutements de travailleurs handicapés alors que, moyennant quelques adaptations, à commencer par celle du poste de travail, ils ont là des travailleurs disponibles et attachés à leur travail. Un point à suivre de près dans le bilan social soumis au CSE.


Références