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Les clés du social : Déserts médicaux : la Cour des comptes tire la sonnette d'alarme

Déserts médicaux : la Cour des comptes tire la sonnette d’alarme

Publié le 27 juillet 2024 / Temps de lecture estimé : 3 mn

Alors que le thème des déserts médicaux et des inégalités d’accès aux soins s’est imposé dans les campagnes électorales successives que vit notre pays, un rapport de la Cour des comptes, publié le 13 mai dernier, pointait que les mesures pour réduire les inégalités d’accès aux soins de premier recours n’étaient pas suffisamment « ciblées ». La Cour demande une politique publique plus structurée.

C’est quoi l’organisation territoriale des soins de premier recours ?

Ces soins sont définis par l’article L. 1411-11 du code de la santé publique. Ils recouvrent, outre les soins des médecins généralistes et de quelques spécialistes accessibles en accès direct, les conseils des pharmaciens, les soins infirmiers et de kinésithérapie, les soins dentaires ou encore ceux assurés par les orthophonistes ou les psychologues. En France, le constat de la Cour des comptes est que l’accès à ces soins est de plus en plus difficile, au point que les chercheurs et les médias qualifient une partie du territoire national de « désert médical ».

Les conditions d’accès aux soins s’aggravent

L’offre de soins résulte d’un double mouvement. D’abord, la répartition des effectifs des professionnels de santé et leur comportement, ensuite la demande qui est en augmentation en raison de la fréquence croissante des pathologies chroniques. Notre population est vieillissante, ce qui explique cela. De ce fait, les patients rencontrent de plus en plus de difficultés à trouver une réponse à leurs demandes de soins et tout cela s’accompagne souvent d’une dégradation de la relation entre professionnels de santé et patients.

Plusieurs indicateurs quantitatifs traduisent ces tensions : les délais moyens pour obtenir des rendez-vous, la part de patients sans médecin traitant, de même que la part de médecins ne prenant plus de nouveaux patients. Parmi les patients sans médecin traitant, la part des plus précaires augmente. Enfin, les inégalités géographiques de répartition des professionnels de santé s’aggravent. Dans certains territoires, le taux de patients sans médecin traitant peut ainsi représenter jusqu’au quart des patients et le taux de passages aux urgences sans gravité particulière atteindre 40 %.

La Cour dénonce des mesures dispersées et peu ciblées

À lire le rapport, on est frappé par la multiplication des plans ou mesures mises en œuvre depuis la fin des années 1990. L’accent a d’abord été mis par l’État sur le rôle de « pivot » donné aux médecins généralistes « référents », puis « traitants ». Des « réseaux de soins » ont été organisés pour faciliter cette orientation et partager la charge du suivi des patients. Divers plans ont ensuite cherché à renforcer les aides versées aux professionnels de santé pour favoriser leur installation, ou leur maintien, dans des zones peu dotées en médecins. À partir des années 2010, l’objectif a plutôt été de développer des structures de soins telles que des maisons de santé pluriprofessionnelles ou des centres de santé médicaux en sollicitant les collectivités territoriales ou à leur initiative pour attirer des médecins. En parallèle, diverses mesures ont cherché à confier des missions d’appui aux professionnels libéraux de premier recours, mais elles sont restées dispersées. Et tout cela sans traduction d’objectifs opérationnels évaluables !

Un contraste cruel

Cette débauche de plans et de mesures rend d’autant plus cruel le contraste entre l’ambition des mesures affichées et le « sentiment d’abandon » que peuvent ressentir des habitants des territoires les plus fragilisés. Les aides apportées se révèlent inefficaces si l’on en juge par leur faible impact. En outre, la possibilité pour les diverses professions de santé d’organiser des coopérations structurées est insuffisamment mise en pratique.

La Cour demande une politique publique structurée

Au-delà des efforts nouveaux, en particulier des collectivités territoriales, la Cour demande une stratégie globale pour répondre aux problèmes identifiés dans chaque territoire départemental par l’ARS et la CPAM. Elle doit être animée par une logique de résultats, à partir d’une batterie très sélective d’indicateurs « d’alerte ». Les administrations nationales devraient soutenir cette démarche, en guidant et évaluant ses progrès de manière périodique. La Cour plaide pour une obligation d’exercice partiel des médecins en zones médicalement sous-dotées.

Une première réponse avec la loi Valletoux

La promulgation de la loi fin 2023 est une première étape. Elle propose quelques dispositions concrètes en encourageant l’installation de longue durée des médecins sur un territoire par des mesures coercitives. Pour y arriver, elle interdit notamment l’intérim en début de carrière et limite à une fois tous les dix ans les bénéfices de certaines aides à l’installation pour les médecins ou certaines exonérations. Mais la loi n’a pas encore produit d’effet et la situation est telle que, pour la Cour, des changements structurels de politiques publiques seront nécessaires.


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