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Représentativité patronale : une mesure plus objective mais pas de grands bouleversements !

mercredi 21 juin 2017

Comme pour les organisations syndicales de salariés depuis 2008, la capacité à négocier des différentes organisations patronales est maintenant établie sur de nouveaux critères plus objectifs et non plus comme c’était le cas auparavant sur une reconnaissance mutuelle entre syndicats patronaux et pouvoirs publics. Ces nouveaux critères basés sur le niveau d’adhésion des entreprises à telle ou telle organisation et le nombre de salariés de ces entreprises sont le fruit de la loi Sapin puis de négociations difficiles entre le MEDEF, la CGPME et l’UPA actées par la loi Travail. Au final, les résultats confirment la représentativité de ces trois organisations au niveau national même si elles ont elles-mêmes évolué. En effet, la CGPME est devenue CPME, et l’UPA, l’U2P en incluant l’UNAPL. Pas de bouleversements donc, mais une clarification utile.

Les nouveaux critères de représentativité et de mesure de l’audience patronale

La mesure de l’audience patronale est maintenant fondée sur le nombre d’entreprises adhérentes à une organisation patronale et le nombre de salariés de ces mêmes entreprises. Pour être représentative une organisation doit obtenir plus de 8 % de ces deux mesures.

Ces éléments sont calculés sur la base des déclarations faites par les commissaires aux comptes des entreprises (chiffres de 2015 pour les adhésions et 2014 pour les salariés). Ils ont été collectés par la Direction générale du travail qui a mené un important travail d’élimination de double compte des adhésions entre entreprises et établissements et adhésion aux branches professionnelles et organisations territoriales. Au final, on peut penser que les chiffres sont plutôt fiables et que les recours envisagés par l’U2P pour contester leur fiabilité ont peu de chance d’aboutir.

Les résultats

Les trois grandes organisations patronales obtiennent sans problème leur sésame pour être représentatives au niveau national interprofessionnel. Si le MEDEF est la plus faible des trois en nombre d’entreprises adhérentes avec 29,41 % contre 34,54 % à la CPME et 35,89 % à l’U2P, il remporte largement le titre sur le nombre de salariés avec une audience de 70,72 % contre 25 % pour la CPME et seulement 4,22 % pour l’U2P. Ce rapport de force permet au Medef de s’opposer seul à l’extension d’un accord national interprofessionnel signé par une ou les deux autres organisations. Cela avait été le cas, souvenons-nous de l’accord passé entre l’UPA et les organisations syndicales sur la mise en place des CPRIA. Accord contesté par le MEDEF et la CGPME et qui avait été finalement étendu après des années de combat juridique de part et d’autre.

Ces résultats ne bousculent pas fondamentalement la répartition des sièges au sein du conseil d’administration de l’Association de gestion du fond paritaire national (AGPFN). En effet, le compromis établi par les trois organisations qui pondère l’audience à raison de 30 % pour le critère de l’audience dans les entreprises et 70 % pour le nombre de salariés donne 58,37 % pour le MEDEF, 27.89 % pour la CPME et 13,74 % pour l’U2P. C’est aussi ce calcul qui servira de clé de répartition pour la composition des CPRI qui se mettront en place en juillet 2017 à partir des chiffres établis dans les entreprises de moins de 11 salariés.

Par contre, le critère différent de pondération à 50/50 entre les deux mesures modifie sensiblement la répartition des crédits de l’AGPFN au profit de l’U2P qui en obtient ainsi 17,53 % contre 28,99 % pour la CPME et 53,48 % pour le MEDEF. Cela devrait représenter un gain non négligeable pour l’U2P. Cette pondération à 50/50 servira aussi pour la désignation des conseillers prud’hommes employeurs en 2018.

La représentativité dans les branches professionnelles

La Direction générale du Travail a aussi réalisé la mesure de l’audience dans les branches professionnelles. Même si cela ne devrait pas bousculer, là encore, les équilibres généraux, cette mesure devrait clarifier les rapports de force réels entre les différentes organisations et permettre à certaines branches de sortir de guerres intestines qui nuisaient à la qualité du dialogue social.

En fait, il ne devrait pas y avoir de problème. Dans les trois quarts des branches les organisations syndicales n’auront qu’un seul interlocuteur patronal et dans 12 % deux organisations patronales avec pour la plupart des rapports de force très clairs entre organisations. Seules quelques branches importantes enregistrent des scores plus serrés entre organisations : hôtels-cafés-restaurants, organismes de formation, immobilier, transports routiers, fruits-légumes-épicerie-produits laitiers ou encore les entreprises de moins de 10 salariés du bâtiment. En fait, le risque de voir une opposition à l’extension d’un accord devrait être relativement mesuré.

Une étape de plus pour renforcer le dialogue social

Cette réforme de la représentativité patronale à la suite de celle des organisations syndicales confère une légitimité incontestable aux négociateurs patronaux et aux accords qu’ils négocient. Elle renforce le poids du dialogue social au niveau national interprofessionnel dans le processus d’élaboration de la norme sociale. Dans les branches professionnelles, cette réforme va de pair avec la diminution de leur nombre et devrait donner plus de poids et de vigueur au dialogue social à ce niveau alors même que le dialogue au niveau de l’entreprise devrait être renforcé.

Aux acteurs maintenant de se saisir de ces nouvelles opportunités pour démontrer que le dialogue social en France est porteur de progrès à la fois pour les entreprises et les salariés.
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