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Les clés du social : L'enjeu du logement et de l'habitat

L’enjeu du logement et de l’habitat

Publié le 23 janvier 2021 / Temps de lecture estimé : 6 mn

Le logement revêt un enjeu politique majeur

Il est transversal car il se rapporte également au contexte plus général de l’habitat, abordant à la fois le travail (et télétravail), la mobilité, la santé, l’éducation et l’intégration… Cet enjeu de politiques publiques suscite des débats et est repris dans des propositions lors des élections, municipales et pour les intercommunalités comme en 2020, ou à l’occasion des échéances électorales à venir. Les citoyens sont en attente de solutions pour améliorer l’accès au logement et à son environnement. Sans considérer les effets négatifs de la crise, nous pouvons relever la marge de manœuvre que dégage le budget annuel du ministère du Logement, s’élevant à 40 milliards d’euros, alors que la fiscalité immobilière rapporte à l’État environ 75 milliards d’euros par an.

Selon les statistiques publiées par l’Insee Focus - décembre 2020 -, on décompte en France (hors Mayotte), au 1er janvier 2020, 37 millions de logements, composés à 82% de résidences principales dont 55% de logements individuels et la part de propriétaires, stable, avoisine les 58%. Les résidences principales sont situées à 16% dans l’unité urbaine de Paris alors que la répartition de la localisation des résidences secondaires concerne pour 40% des communes d’unités urbaines de moins de 100 000 habitants, et autant hors unités urbaines. Ces données montrent l’importance de la mise en œuvre d’une politique du logement et de l’habitat à la fois efficiente, évolutive et lisible, en cohérence avec l’ensemble des aspects complexes de cette problématique.

Qu’est-ce que l’aire d’attraction d’une ville ?

Il s’agit d’une conception qui prend appui sur les flux domicile-travail (recensement 2016), et sur le nombre total d’habitants déterminant le classement des aires (recensement 2017). Ainsi, l’Insee Focus - octobre 2020 - définit l’aire d’attraction comme un ensemble de communes constitué d’un pôle de population et d’emploi, et d’une couronne rassemblant des communes dont 15% au moins des actifs travaillent dans ce pôle. La commune-centre est la commune la plus peuplée d’une aire.

Neuf personnes sur dix sont regroupées dans 699 aires d’attraction (682 en métropole et 17 dans les Dom). La moitié de la population réside dans un pôle - 28% dans les communes-centres et 23% au sein des autres communes constituant les pôles - alors que les couronnes (pour 43% de la population) et les communes hors attraction des villes (à concurrence de 7%) rassemblent l’autre moitié. L’aire d’attraction de Paris regroupe à elle seule une personne sur cinq (13 millions d’habitants vivant dans cet ensemble).

De 2007 à 2017, la croissance de la population s’est accentuée dans les aires d’attraction de 700 000 habitants ou plus, alors que, depuis 2012, la population est restée stable dans les aires de moins de 50 000 habitants et dans les communes hors aires. L’augmentation de la population s’est avérée plus faible dans les communes-centres, moins dynamiques (déficit migratoire à Paris ou solde naturel négatif dans d’autres communes).

Les projets ou décisions prises par nombre de ménages, au-delà des conditions financières et de la configuration du logement, prenaient en compte l’attractivité de la zone d’habitat en retenant comme critères de choix la qualité de vie, les facilités offertes sur le territoire et un cadre urbain respectant les normes environnementales en usage.

Vivre mieux dans une ville dense

Ce thème n’est pas nouveau et était déjà abordé dans un rapport du think tank Terra Nova (septembre 2019), convenant de la nécessité d’allier les politiques « du temps » à celles de projets d’aménagements urbains ainsi qu’à l’évolution de la culture numérique qui offre à tous les habitants des outils organisant au mieux le temps journalier de chacun.

Concernant les mobilités, la réflexion portait sur le rythme à adopter pour se déplacer dans une métropole comme Paris, entre les adeptes des mobilités douces (vélos, trottinettes), les inconditionnels de la voiture, les usagers du métro ou des bus, et les cas isolés…, et cela concerne également le « Grand Paris ». Revisiter cette organisation collective, avec intelligence et discernement, suscite des débats et conflits qui reflètent l’impact des villes denses sur le quotidien des citoyens, dans toutes les métropoles.

L’intensité des mutations technologiques ou des modes de vie, occasionnant une accélération des différents rythmes, sont explorés au travers des trajets transports/ travail. L’amélioration des transports sur les distances est évidente mais les temps de trajet restent élevés et provoquent une dégradation des conditions de travail, voire une souffrance due à la réduction des temps de repos et de sommeil, engendrant parfois un burn out.

Les emplois sont majoritairement proposés dans les villes-centres alors que les usagers habitent souvent en zones périurbaine ou rurale. Ce phénomène, touchant en premier lieu les salariés pour se rendre sur leur lieu de travail, concerne également les nombreux temps de trajets complexes, se rapportant à des activités indispensables à la vie familiale et sociale des ménages et effectués sur des « temps libres ». Des expériences sont donc à mettre en œuvre dans l’espace urbain pour améliorer la synchronisation des rythmes, par une meilleure flexibilité qui privilégie la coexistence de temporalités différentes, par exemple en aménageant les horaires de bureau ou ateliers et en élargissant le cadre du télétravail.

Pour les rédacteurs du rapport de Terra Nova, il importe également d’éviter l’isolement subi par les habitants de zones périurbaines ou rurales. Dans cette optique, des solutions émergent, facilitées par la transition vers les usages numériques qui optimisent les flux d’information et l’organisation des différents transports. Un rapport confié à Luc Belot et rendu au Premier ministre en 2017 (« De la smart city au territoire d’intelligence ») prône notamment l’utilisation d’un guidage « intelligent ». Ce rapport démontre qu’une information uniformisée des différents transports faciliterait grandement la vie de la population, et prend l’exemple d’un parc de 10% de véhicules équipés d’un système de guidage qui apporterait un gain de 5% sur le temps de trajet pour tous. Un tel projet de déploiement numérique servirait concrètement la localisation d’un logement par rapport aux déplacements générés qui seraient facilités par des transports adaptés par un guide.

L’évolution du cadre de vie

Les habitants ne sont pas aujourd’hui tous égaux face à leurs conditions de logement. Cependant, considérée individuellement, une majorité de ménages souhaitait jusqu’alors se maintenir dans des villes denses ou au sein de zones d’habitat avec une population suffisante autour. Car cette large population souhaite généralement disposer d’un environnement de proximité qui comprenne des services publics suffisants (écoles, collèges et lycées, systèmes de santé…), des commerces ou des services nombreux et de qualité, ainsi qu’un bon réseau de transports interconnectés ou d’infrastructures facilitant les déplacements en voitures. Il est vrai aussi que de plus en plus de personnes, sensibilisées à la nécessité de la mise en œuvre de politiques écologiques, aspiraient ces dernières années à ce que leur ville investisse pour améliorer l’environnement (parcs…).

La crise sanitaire et sociale a quelque peu rebattu les cartes. Nous subissons plusieurs crises, climatique et environnementale mais aussi une crise économique et sociale liée aux menaces sur l’emploi dans la quasi-totalité des territoires. Cette situation nécessite une amplification des mesures d’accompagnement de la mutation vers de nouveaux postes ou formes de travail. Ainsi, l’accroissement qui se généralise du télétravail, des changements de lieu des postes de travail ou, par exemple, des besoins exponentiels de formation… vont amplifier la crise du logement et de l’habitat que notre pays vit depuis de nombreuses années, notamment due à une persistante insuffisance de logements sociaux ou intermédiaires.

L’élément nouveau de ce contexte consiste dans le fait que les citoyens évoluent très rapidement, et durablement, en optant pour des choix de modes de vie différents et leurs approches et comportements sur tout ce qui touche à l’habitat s’en trouvent modifiés. Ces nouvelles orientations portent pour l’essentiel sur les mobilités (véhicules électriques, covoiturage, autopartage…), le travail (télétravail, coworking…), et le récent développement des formes modernes de consommation (e-commerce et drive, circuits courts…).

Avec la crise sanitaire, nos concitoyens se tournent vers des recherches de logement qui changent considérablement, en particulier en essayant de s’offrir la possibilité de disposer d’un extérieur (jardin ou balcon) et de davantage d’espace. Vivre dans une ville dense et ses petits appartements a été globalement très mal vécu pendant le confinement et ce douloureux constat, en 2020, a fait naître ou renforcer dans les ménages l’idée d’un idéal d’installation dans des villes moyennes ou petites, ou même dans un territoire de campagne.

La période très particulière que nous traversons met en lumière d’une part, les inégalités des conditions de logement et d’habitat entre citoyens en avançant un enjeu de solidarité, et d’autre part la nécessité de concilier à la fois la recherche d’un cadre de vie de qualité, avec davantage d’espace, extérieur et intérieur, et la nécessité de redimensionner avec mesure les densité et sobriété foncières utilisées.

L’habitat et le logement sont des priorités pour le quotidien des Français, tout d’abord par rapport à leur besoin individuel mais aussi en assumant une vision collective. La maîtrise de construction de logements, de leurs rénovations, notamment en matière de confort thermique, de prise en compte des nouveaux modes d’habitat, d’étalement urbain et d’aménagement des territoires, est un important challenge pour tous les acteurs publics.