Dans son dernier France Portrait social, l’INSEE révèle ainsi que les revenus salariaux issus du travail ont crû de seulement 0,2% par an entre 2007 et 2012. C’est trois fois moins qu’entre 2002 et 2007 où ces mêmes revenus salariaux augmentaient de 0,6% par an. Bien évidemment, le revenu salarial augmente plus vite dans le secteur privé que dans la fonction publique, où celui-ci est freiné par le gel du point d’indice récurrent depuis plusieurs années.
De plus, l’écart salarial entre les jeunes de moins de 25 ans et le reste de la population s’est accru avec les difficultés des jeunes à trouver un emploi suite à la crise. Les gains salariaux des jeunes sont inférieurs en moyenne de 4,8% aux gains salariaux des autres salariés. Les cadres sont aussi touchés par la crise avec un gain de rémunération qui est de 1% inférieur à celle des autres catégories après 2008. Seule note positive, l’écart salarial hommes-femmes s’est un peu réduit, l’évolution des gains salariaux des femmes étant supérieure de 2,9% à celle des hommes.
On constate aussi que les inégalités de salaires se sont amplifiées avec la fin des coups de pouce au SMIC. La convergence des SMIC horaires entre 2003 et 2005, ajoutée aux coups de pouce, avait permis une hausse plus importante des bas revenus, faisant que les salariés du premier décile (les 10% des salariés les moins bien payés) voyaient leur revenu s’accroître de près de 2% entre 2002 et 2007. Cette tendance s’inverse ensuite avec la crise, les revenus du 1er décile baissent de près de 1% entre 2007 et 2012. Au contraire la moyenne des gains salariaux est restée stable autour de 0,5% par période de 5 ans. Point plus surprenant car il va au contraire des idées reçues, le dernier décile (les 10% les mieux rémunérés) a vu ses revenus salariaux diminuer aussi après la crise (mais ce dernier décile ne vit pas que de revenus salariaux…). Ainsi la masse salariale reçue par les mieux rémunérés a même légèrement diminué au total.
Le document de l’INSEE ne porte néanmoins que sur les revenus salariaux. Or on sait que les déciles supérieurs bénéficient d’autres revenus, provenant de leur épargne ou de leur capital immobilier. C’est pourquoi d’autres études évoquent plutôt une croissance des inégalités, y compris en France. En effet si on ajoute ces autres revenus, la balance penche alors clairement en faveur des déciles élevés qui sont moins dépendants des revenus du travail que les premiers déciles. Par exemple, l’OCDE souligne que la part du capital dans les revenus a doublé entre les années 80 et 2000 et s’est concentrée dans les déciles supérieurs tandis que le système de redistribution sociale est devenu moins efficace avec la crise (http://www.oecd.org/fr/france/49177803.pdf).
Ceci corrobore d’autres études notamment de l’économiste Thomas Piketty.
Insee, France Portrait social 2014