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Les clés du social : La protection sociale en Europe en 2023, coûteuse mais largement redistributive

La protection sociale en Europe en 2023, coûteuse mais largement redistributive

Publié le 19 mars 2025 / Temps de lecture estimé : 5 mn

La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) publie chaque année une comparaison internationale des dépenses de protection sociale en Europe. Elle distingue pour chacun des pays des 27 pays de l’UE le poids des recettes et dépenses consacrées aux risques sociaux : maladie, invalidité, vieillesse survie, famille, emploi, logement et pauvreté exclusion sociale.

Son impact dans le PIB

Le premier indicateur de l’étude 2023 porte sur la part de PIB que les pays de l’UE consacrent aux dépenses de protection sociale. Nous apprenons ainsi qu’elles représentent en moyenne 26,6 % du PIB dans les pays de l’UE-27, ce qui correspond à 10 540€ par habitant en parité de pouvoir d’achat (PPA), et la France est le pays d’Europe qui consacre la part de dépense la plus importante en proportion de PIB aux prestations de protection sociale avec 31,5 %, en occupant la cinquième position de dépenses par habitant avec 12 960€ (PPA).

Il faut néanmoins noter que les écarts sont marqués entre zones géographiques.
Les pays d’Europe du Nord et de l’Ouest sont ceux qui dépensent le plus pour la protection sociale, les pays du sud de l’Europe se trouvent dans une situation intermédiaire, avec des niveaux de dépenses compris entre 13,2% du PIB à Malte et 28,1%en Italie, tandis que les pays de l’Est y consacrent des sommes bien inférieures à celles du reste de l’Europe, tant en pourcentage du PIB qu’en euros en PPA par habitant.
Le point commun étant que les dépenses de protection sociale repartent à la hausse en euros constants dans une majorité des pays européens, soit une moyenne en augmentation de dépenses en euros constants dans l’UE 27 qui atteint 0,1 % en 2023, et 15 pays de l’UE 27 ont des dépenses en hausse.
Les hausses les plus importantes observées sont en Pologne (+8,2 %), en Slovaquie (+7,8 %) et à Chypre (+5,9 %), des pays où les dépenses avaient fortement baissé en 2022. En France, les dépenses de protection sociale reculent pour la deuxième année consécutive, avec -1,9 % en 2023 après 2,0 % en 2022. En 2023, la baisse des dépenses à prix constants est notamment portée par les risques maladie (3,2 %) et vieillesse survie (1,0 %).

Les risques vieillesse-survie et maladie-soins de santé sont les principaux postes de dépenses de protection sociale, ils constituent le premier poste de dépenses de protection sociale dans la quasi-totalité des pays européens. Ces prestations comprennent principalement le versement des pensions de retraite qui représentent 47 % de l’ensemble des prestations sociales en moyenne dans l’UE-27.

Le risque maladie-soins de santé est, en moyenne, le deuxième poste de dépenses de prestations sociales, Il représente 30 % du total des prestations dans les pays de l’UE-27 avec des variations, selon les pays, de 22 % en Italie et au Danemark jusqu’à 45 % en Irlande.
Il représente 31 % du total de prestations pour la France, soit légèrement plus que la moyenne européenne.

Les montants de dépenses pour les autres risques sont nettement plus faibles et varient d’un pays à l’autre. En 2023, dans l’Union européenne, les dépenses pour les risques famille, invalidité, emploi, logement et pauvreté-exclusion sociale représentent 23 % de l’ensemble des prestations (24 % en France).

Son financement

  • La structure globale du financement de la protection sociale est liée à l’importance relative des différents risques dans les dépenses totales.
  • En Europe, le financement de la protection sociale repose principalement sur les cotisations sociales assises sur les salaires et sur les contributions publiques financées par l’impôt. Sa répartition entre ces deux sources varie d’un pays à l’autre, reflétant l’histoire et l’évolution de chaque système de protection sociale.
  • Dans l’ensemble des pays, certains risques sont davantage financés par les contributions publiques et d’autres par les cotisations.

Pour illustrer le propos, notons que les prestations du risque vieillesse-survie, premier poste de dépense de la protection sociale, sont généralement liées aux revenus d’activité passés et financées par des cotisations sociales (sauf au Danemark, où les pensions publiques de base sont forfaitaires).

Les prestations du risque emploi sont, elles aussi, financées par des cotisations sociales dans la plupart des pays, sauf au Danemark et en Irlande.

En revanche, les prestations logement et de lutte contre l’exclusion sociale, qui relèvent d’une logique de solidarité nationale, sont généralement alimentées par des contributions publiques.

Le financement du risque maladie, deuxième poste de dépense de la protection sociale, varie selon les pays. Il repose principalement sur les contributions publiques, en Suède et au Danemark et sur les cotisations sociales en Allemagne, aux Pays-Bas ou encore en Pologne. En France, le financement du risque maladie a évolué en 2018 avec la suppression des cotisations salariales maladie et chômage, remplacées par une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG, une contribution publique) sur une base de revenus plus large (incluant les revenus de remplacement et de patrimoine).

Enfin, le financement des prestations du risque famille est le plus souvent assuré par des contributions publiques, sauf en France et en Suède où le financement par cotisations sociales demeure majoritaire. Depuis les années 2000, une tendance similaire est observée dans la quasi-totalité des pays d’Europe, la part des cotisations employeurs diminue au profit des contributions publiques, pour limiter la hausse du coût du travail.

Différences de taux de chômage

Le taux de chômage s’établit en 2023 à un niveau inférieur à la période pré-crise sanitaire pour la deuxième année consécutive. En moyenne 6,1 % de la population active des pays de l’UE-27 était au chômage (6,8 % en 2019). En France, il s’établit à 7,4 % en 2023, contre 8,5 % en 2019.
Les contrastes entre pays sont très marqués, le chômage est particulièrement élevé dans les pays du sud de l’Europe et plus bas dans les pays d’Europe de l’Est. L’Espagne et la Grèce affichent les taux de chômage les plus élevés de l’UE-27, avec 12,3 % et 11,2 % de chômeurs, mais largement inférieurs à ceux qui ont été observés avant la crise sanitaire.
À l’inverse, l’Europe de l’Est présente globalement les taux de chômage les plus bas de l’UE-27, même si des variations importantes sont observées entre les pays ; de 7,1 % en Lettonie à seulement 2,6 % en Tchéquie et 2,9 % en Pologne.

Les écarts entre pays peuvent s’expliquer par des marchés du travail qui fonctionnent différemment. En Allemagne et aux Pays-Bas, par exemple, les faibles niveaux de chômage (respectivement 3,2 % et 3,5 % en 2023) résultent pour partie d’un recours important aux contrats courts et à l’emploi à temps partiel. Si ces dispositifs facilitent l’accès à l’emploi pour un large éventail de travailleurs et accroissent la flexibilité du marché du travail, en permettant une adaptation rapide aux fluctuations économiques – d’où des taux de chômage relativement bas - ces emplois sont en revanche souvent accompagnés de salaires moins élevés pour les salariés concernés et de conditions de travail plus précaires.

Un système social coûteux certes, mais très redistributif

Ainsi malgré les différences de construction ou de modalités de financements, chacun s’accorde à considérer que le modèle social européen est assez convergent et l’un des plus complets en matière de couverture des risques. Pour conclure, nous pouvons saluer le caractère très redistributif du modèle social européen (16,2 %), qui a permis en 2022 de réduire significativement le taux de pauvreté monétaire de 9 points dans l’UE-27.


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