Une étude parue dans la revue Nature
C’est une équipe internationale qui a suivi année après année les impacts démographiques de la pandémie. Il s’agit de chercheurs de l’université d’Oxford (RU) et de l’Institut Max Planck (All). Ils ont rassemblé des données provenant de 29 pays (principalement européens, ainsi que le Chili et les États-Unis, en les recoupant avec les 3 années que nous venons de vivre et qui ont vu le développement de la vaccination mais aussi l’émergence régulière de nouveaux variants causant de multiples infections.
Déjà ils avaient constaté que l’année 2020 avait entrainé une chute de 2 ans d’espérance de vie aux États-Unis et d’un an en Angleterre et au Pays de galles. L’enquête de 2021 montre que, si l’Europe de l’Ouest retrouve une meilleure perspective, l’Europe centrale et les États-Unis voient s’installer une situation difficile avec des pertes supplémentaires. Dans ce paysage, seule la Norvège a dépassé son espérance de vie de 2019.
Ce qu’est l’espérance de vie ?
Il s’agit du nombre d’années qu’une personne née aujourd’hui pourrait espérer vivre, si elle vivait toute sa vie avec les taux de mortalité de l’année en cours sans amélioration ni détérioration. Pour les chercheurs « elle est calculée sur la base des décès, toutes causes confondues : elle ne dépend donc pas de l’exactitude de l’enregistrement des décès liés au Covid, et peut donner une image plus large de la façon dont la pandémie a affecté la mortalité ».
Les démographes considèrent l’espérance de vie comme une mesure très utile car elle est comparable entre les pays et dans le temps.
L’Europe de l’Est et les États-Unis sont particulièrement touchés
Les mauvais chiffres de Europe de l’Est en termes de perte d’espérance de vie entre 2019 et 2021 en nombre de mois :
- Bulgarie : 43 mois de perte.
- Pologne : -26,6 mois.
- Hongrie : -24,6 mois.
Pour les chercheurs, ces baisses s’expliquent par un double phénomène. La région a évité certaines des vagues précoces de Covid en 2020, ce qui n’a pas permis une première immunisation naturelle de la population. Et ensuite elle a moins utilisé les vaccins lors des grandes vagues de 2021.
La situation aux États-Unis est aussi très mauvaise pour des raisons différentes et malgré une utilisation précoce des vaccins. Le pays a perdu plus de deux ans d’espérance de vie en 2020 auxquels se rajoutent près de trois mois en 2021. Pour les épidémiologistes, les États-Unis ont un taux d’utilisation des vaccins et des rappels inférieurs à celui des autres pays occidentaux. De plus, leur espérance de vie n’est pas en progression depuis 2014 et la pandémie a révélé et exacerbé des vulnérabilités sanitaires sous-jacentes. Un tiers de la population souffre d’obésité et 10 % de diabète. Des facteurs aggravants en cas de Covid. Enfin, la baisse de l’espérance de vie est aussi liée à des décès liés aux drogues et à l’alcool.
L’Europe de l’ouest n’est pas homogène
L’Angleterre et le Pays de Galles ont gagné 2,1 mois en 2021 après avoir perdu presque un an en 2020. La France, de son côté, fait partie des huit pays qui ont connu un rebond significatif : l’Hexagone a regagné 5 mois d’espérance de vie en 2021 après une perte de 6,2 mois en 2020, retrouvant ainsi un niveau proche de celui de 2019 (comme la Belgique, la Suisse et la Suède). Ces quatre pays ont réussi à la fois à protéger les plus âgés comme les plus jeunes.
En réalité, la perte d’espérance de vie au niveau mondial est certainement supérieure aux chiffres présentés ici. De nombreux pays ne présentent pas des données fiables comme le Brésil, le Mexique, la Russie ou l’Inde et n’ont pu être pris en compte par l’étude. En conclusion, les chercheurs s’attendent à ce que les divergences d’espérance se poursuivent en raison des différences entre les pays en matière d’utilisation des vaccins et des rappels, des infections antérieures et des mesures de santé publique (ou de leur absence).
Sources
- Covid-19 : voilà l’impact réel de la pandémie sur l’espérance de vie (theconversation.com)
- Le Monde des 23 et 24 octobre