Des situations différentes suivant les pays
Au Royaume-Uni comme aux États-Unis et au Canada, les médias et les revues médicales se font largement l’écho du nombre disproportionné de victimes du Covid-19 parmi les minorités ethniques (ce terme est légal dans ces pays), les Afro-Américains ou les Latinos et les migrants et les quartiers qu’ils habitent. Au Royaume-Uni et aux États-Unis, des données ont été collectées et analysées sur cette question. En France, les statistiques ethniques sont contraires à la Constitution mais certains intellectuels ou politiques, dans la situation actuelle de pandémie, plaident pour un changement, arguant du fait qu’il serait utile de se doter d’outils pour mieux intervenir en faveur des populations à risque et que, de manière générale, s’il n’y a pas de « races », il y a du racisme et des discriminations qui s’exercent.
Des enquêtes inédites
Or, sans en arriver là, notre pays dispose déjà d’informations éclairantes comme les enquêtes « Trajectoires et origines » de l’Institut national d’études démographiques (INED) sur l’origine de la population française.
D’autres études de la Dares, du ministère de la Ville ou des Solidarités ont montré les discriminations à l’emploi ou au logement suivant le nom ou le lieu de résidence. Pour ce qui est du Covid-19, l’INSEE a étudié la surmortalité de nombreux départements dont celle du département de Seine-Saint-Denis, au nord de l’Île-de-France, et qui accueille de nombreux immigrants ou leurs descendants.
Les inégalités sociales, facteur clé de la contamination
Les épidémiologistes canadiens Jay S. Kaufman et Joanna Merckx, dans Le Monde, indiquent que si les minorités ethniques sont davantage touchées par le virus dans leur pays, c’est le résultat d’inégalités sociales, et non la manifestation de différences biologiques. De la même manière les chercheurs de l’INSEE qui ont travaillé sur la Seine-Saint-Denis montrent que les disproportions de contamination et de décès s’expliquent en grande partie par les différences socio-économiques et les inégalités professionnelles.
Car en France comme ailleurs dans le monde, ce sont les habitants de ces zones qui conduisent les bus, font le ménage dans les hôpitaux, livrent les courses, sont à la caisse des magasins et s’occupent des personnes âgées dans les maisons de retraite ou chez elles. En règle générale, ce sont ceux qui occupent un travail qui ne leur permet pas d’échapper au virus, les métiers de la désormais fameuse « première ligne » et des logements où s’isoler des autres est plus difficile.
Le cas de la Seine-Saint-Denis
Les données de l’Insee sur la Seine-Saint-Denis montrent que ce département, dont la population est plus jeune que la moyenne, présente néanmoins un record de surmortalité : on y a recensé 130 % de décès en plus entre le 1er mars et le 27 avril par rapport à la même période en 2019. Sa situation rappelle que la santé dépend aussi et surtout des conditions de logement, de transport, d’emploi ou de chômage. Le géographe Daniel Behar écrit aussi que ce territoire est un gigantesque sas d’insertion pour les émigrés, population majoritairement pauvre et mal logée. De plus, le département est profondément intégré aux échanges métropolitains. Chaque jour, ce sont environ 300 000 actifs qui, dans chaque sens, entrent et sortent du département et, dans leur grande majorité, utilisent les transports en commun.
En guise de conclusion
L’épidémie de Covid-19 a révélé que l’âge joue un rôle aggravant dans l’exposition au virus. Au fur et à mesure que les enquêtes s’affinent on voit que les conditions de vie et d’emploi jouent aussi un rôle essentiel.
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Sources