33 mesures présentées le 21 juillet
Olivier Véran, le ministre de la Santé et Nicole Notat, ancienne secrétaire générale de la CFDT, chargée d’animer la concertation, ont présenté le 21 juillet le second volet du Ségur de la santé, consacré aux réformes structurelles. Celui-ci prend la forme de 33 mesures pour « accélérer la transformation du système ».
Le ministre a déclaré : « Les conclusions du rapport de Nicole Notat scrutent avec rigueur et ambition un système de santé qui suscite autant la fierté que la crainte de le voir perdre peu à peu son éclat. Elle propose des orientations fortes qui sont des fondations sur lesquelles nous allons bâtir, avec les territoires, la santé de demain ».
Le second volet du Ségur comporte trois piliers intitulés respectivement : « Définir une nouvelle politique d’investissement et de financement au service de la qualité des soins », « Simplifier les organisations et le quotidien des équipes de santé pour qu’ils se consacrent en priorité à leurs patients » et « Fédérer les acteurs de la santé dans les territoires au service des usagers ».
19 milliards d’investissements pour les hôpitaux et le médicosocial
La mesure la plus spectaculaire et la plus attendue est celle d’une enveloppe de 19 milliards d’euros d’investissements pour le secteur hospitalier et le secteur médicosocial. Elle concerne d’abord la reprise par l’État de 13 milliards d’euros de dette hospitalière (déjà programmée et financée) et un plan d’investissement proprement dit de 6 milliards d’euros : 2,5 milliards sur cinq ans pour les projets hospitaliers prioritaires et les investissements de collaboration, médecine de ville et hôpital, 2,1 milliards sur cinq ans pour la transformation, la rénovation et l’équipement des établissements médicosociaux (notamment les Ehpad) et 1,3 milliard sur trois ans pour rattraper le retard sur le numérique. Un véritable coup d’accélérateur aux projets en cours ou à venir.
Il est également prévu une nouvelle gestion de ces investissements en associant davantage les élus locaux et en permettant aux territoires de mener à bien les projets ne dépassant pas 100 millions d’euros (HT) sans en passer par la tutelle parisienne.
Une déconcentration des décisions d’investissement, mais peu de changements pour la T2A
Le Ségur ne prévoit pas de supprimer la T2A (tarification à l’activité) mais prévoit plutôt d’accélérer la réduction de sa part au profit de modes de financement alternatifs, prenant davantage en compte la qualité et la pertinence des soins. Il est également prévu d’expérimenter un modèle mixte de financement des activités hospitalières de médecine, intégrant une approche basée sur l’étude de la population concernée. Soigner des jeunes et des personnes âgées, ce n’est pas même chose.
4 000 lits pourront être créés à la demande
La mesure prévue, tirée directement de l’expérience de la crise sanitaire, consiste à financer l’ouverture ou la réouverture de 4 000 lits à la demande. Il s’agira de permettre aux établissements de s’adapter à une suractivité saisonnière ou épidémique et, si nécessaire, de fluidifier aussi l’aval des urgences, problème bien connu.
Simplification des organisations
Le troisième pilier répond à une demande forte des soignants, en luttant contre ce qu’ils appellent les « irritants du quotidien ». On parle là de complexités inutiles et de pertes de temps. De plus, à contre-pied d’un passé récent, le Ségur de la santé prévoit de réhabiliter le rôle et la place des services au sein de l’hôpital pour mettre fin aux excès de la loi HPST (loi Hôpital, patients, santé et territoires du 21 juillet 2009, dite loi Bachelot). Les pôles (regroupant plusieurs services) ne seront pas supprimés pour autant, mais les services bénéficieront de davantage de délégation et de marges de manœuvre, tandis que chaque établissement public de santé pourra désormais proposer et adapter son organisation interne au contexte local, en allant même jusqu’à des pôles optionnels.
De plus, les établissements et les territoires obtiennent la capacité d’adapter les règles du code de la santé publique. La mesure vise notamment les groupements hospitaliers de territoire (GHT), jugés trop uniformes et trop rigides.
Sur la simplification de la commande publique, dont les règles ont pesé sur la réactivité des acteurs publics durant la pandémie, le Ségur se contente de prévoir le lancement d’un groupe de travail sur la clarification et la simplification de la commande publique, « pour tenir compte des spécificités de l’activité hospitalière ».
La gouvernance des hôpitaux avance à petits pas
Les décisions relevant du domaine médical seront désormais prises conjointement par le directeur de la structure et le président de la commission médicale d’établissement (CME). Pour le reste, les missions de la CME seront redéfinies et renforcées et un représentant des personnels paramédicaux sera désormais appelé à siéger au sein du directoire, instance stratégique et décisionnaire des établissements.
Enfin, le Ségur de la santé entend « mieux prévenir les conflits à l’hôpital », à travers un effort sur la prévention et le règlement des conflits au niveau local, la généralisation des dispositifs de conciliation au sein de chaque établissement.
Les autres acteurs de la santé
Pas de bouleversement en vue du côté des ARS (agences régionales de santé) décriées pendant la pandémie. Le gouvernement prévoit simplement de « renforcer le dialogue territorial avec les élus en développant la présence des ARS à l’échelon départemental » (en l’occurrence les délégations départementales) et de donner davantage de place aux élus au sein des conseils d’administration des ARS.
Parmi les autres mesures, on retiendra notamment la poursuite du soutien au développement de la télésanté et l’élargissement de la prise en charge conventionnelle des actes de télémédecine aux sages-femmes et aux chirurgiens-dentistes. Le Ségur prévoit aussi la mise en place d’une « offre de prise en charge intégrée ville-hôpital-médicosocial pour les personnes âgées ».
Un chiffrage jamais vu
Lors de la présentation du Ségur un chiffrage détaillé a été présenté. Il est d’une ampleur encore jamais vue dans ce secteur : 28,1 milliards d’euros, soit 9,1 milliards pour le fonctionnement et 19 milliards pour l’investissement (y compris les 13 milliards de reprise de la dette des hôpitaux). L’essentiel des 9,1 milliards (8,3 milliards) serviront à financer les mesures sur les rémunérations et les carrières.
Sources