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Les clés du social : La pénibilité des emplois de l'économie verte

La pénibilité des emplois de l’économie verte

Publié le 31 janvier 2024 / Temps de lecture estimé : 3 mn

La transition écologique est un impératif, si bien que les emplois dans ce secteur ont largement progressé dans ces dernières années. Mais quelle est la qualité de ces emplois, y a-t-il une bonne conciliation entre les enjeux environnementaux et les enjeux sociaux ? La Dares s’est penchée sur cette question à partir de deux enquêtes « Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels » (Sumer) des années 2010. Même si ces enquêtes ont quelques années (Sumer n’est pas réalisé tous les ans), les données et analyses qu’elles permettent n’ont pas perdu leur acuité et montrent les progrès à réaliser.

Chiffres et métiers

Ces professions de l’économie verte regroupent de nombreux salariés : 15,3 % des emplois de France métropolitaine, soit près de 4 millions en 2019, avec 1,1 % d’emplois verts et 14,2 % d’emplois verdissants [1]. Ils connaissent une forte progression : par exemple, +36 % de 2004 à 2016 (5,2 % pour l’ensemble de l’économie).

Ce sont surtout des emplois d’hommes (80 %), essentiellement à temps complet (90 %). Beaucoup sont ouvriers, qualifiés plutôt dans l’économie verdissante ou non qualifiés (+ d’1/4 des métiers verts). Cadres et professions intermédiaires sont plus nombreux dans les emplois verdissants. Et les employés sont très peu présents. D’autre part, plus de 40 % sont fonctionnaires ou agents à statut dans les métiers verts. Quand aux salariés privés, on les trouve beaucoup dans des entreprises assez importantes, de 50 à 499 salariés (30 %) et de 500 et plus (20 %).

Que font ces actifs ?
Principaux métiers Professions vertes Professions verdissantes
Nettoyage, gardiennage, entretien ménager 20 %
Production, fabrication, chantier, construction 17 % 26 %
Installation, réparation, maintenance 13 % 17 %
R et D, études, méthodes 10 % 15 %

Métiers de l’économie verte et pénibilité

La caractéristique est la plus forte exposition des salariés de l’économie verte aux facteurs de pénibilité : 67 % y sont exposés contre 60 % des salariés français de métropole. En particulier Ils souffrent plus de contraintes physiques marquées (57 % contre 47 %) en particulier de postures pénibles (52 % contre 43 %), et d’exposition à un environnement physique agressif, en premier les expositions aux agents chimiques toxiques (agents CMR : 23 % contre 7,5 %) et aussi les nuisances sonores (16 % contre 8 %), beaucoup moins de rythmes de travail atypiques (nuits, travail posté, travail répétitif). Bien sûr derrière ces chiffres globaux se cachent des disparités entre emplois verts et emplois verdissants, entre catégories socioprofessionnelles et entre professions.

Les risques professionnels encourus dépendent essentiellement des profils des métiers exercés et sont identiques entre les salariés de même métier qu’ils soient dans l’économie verte ou hors d’elle, en particulier pour le port répété de charges lourdes, les postures pénibles, les nuisances thermiques ou les rythmes de travail atypiques. Cependant des écarts existent pour d’autres types d’exposition, tels les vibrations et bruits nocifs (+14 à 16 points) et, pour les professions verdissantes, les agents CMR (+10 points).

La pénibilité se réduit-elle ?

Depuis le début du 21ème siècle, des politiques de santé publique ont été développées par les pouvoirs publics, avec la loi de 2004 sur la politique de santé publique et les plans santé au travail successifs à partir de 2005, avec comme objectifs la prévention des maladies professionnelles, la diminution des expositions aux risques. Le résultat en a été la diminution du pourcentage de salariés soumis à au moins un facteur de pénibilité (moins 5 % entre 2010 et 2017), mais une baisse plus réduite dans l’économie verte : -1,7 % seulement.

Certes pour ces emplois l’exposition aux rythmes de travail atypiques a nettement baissé, en particulier le risque de travail répétitif, mais le travail de nuit a crû. En outre les facteurs de risques d’un environnement physique agressif ont stagné, avec même une augmentation des risques des agents chimiques CMR contrairement aux emplois non verts. Et leur exposition aux contraintes physiques, au contraire des emplois non verts, a augmenté, en premier les vibrations mécaniques. Bien sûr ces évolutions ont été inégales selon les métiers exercés et le contrat de travail, avec des aggravations des conditions de travail pour les ouvriers, les salariés en travail posté et ceux en contrat précaire.

Et maintenant ?

L’étude montre bien que des stratégies de prévention sont à développer pour obtenir la suppression ou la réduction des expositions aux facteurs de pénibilité en particulier pour ces salariés surexposés. Par exemple un usage de produits non toxiques et alternatifs aux CMR, mettant enfin en œuvre la réglementation européenne Reach des produits chimiques… La nouvelle enquête Sumer, sur 2022-2023, sera à suivre de près pour voir la suite de la prise en compte de ces sources de pénibilité.

C’est d’autant plus important que ces emplois sont indispensables aux politiques de transition écologique, qu’ils en sont un facteur primordial de réussite et qu’ils sont en nombre grandissant. Il y a donc là un travail syndical et des élus du personnel à faire, en particulier, quand elles existent, dans les commissions SSCT des CSE, pour améliorer les conditions d’exercice de ces métiers verts ou verdissants.


Source


[1Les principaux métiers verts ou verdissants : à retrouver dans Clés du social :
https://www.clesdusocial.fr/ou-en-sont-les-metiers-de-la-transition-ecologique