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Les clés du social : Le détachement de salariés en Europe

Le détachement de salariés en Europe

Publié le 24 juillet 2013 / Temps de lecture estimé : 2 mn

Environ un million de travailleurs sont détachés chaque année par leurs employeurs dans un autre pays de l’Union pour des prestations de services. Ils représentent seulement 0,4 % de la main-d’œuvre de l’UE. Ils viennent en majorité de Pologne, d’Allemagne, de France, du Luxembourg, de Belgique et du Portugal. On les rencontre surtout dans les métiers demandant beaucoup de main d’œuvre (BTP, agriculture et agroalimentaire…). Avec la crise, leur nombre a augmenté.

Un salarié est considéré comme « détaché » s’il travaille dans un État membre de l’UE parce que son employeur l’envoie provisoirement poursuivre ses fonctions dans cet État membre, que ce soit dans le cadre d’un contrat obtenu par l’employeur ou de l’envoi dans une filiale. C’est donc différent des travailleurs migrants qui se rendent dans un autre État membre pour y chercher un emploi et y travailler.

La situation de ces salariés détachés est mixte : ils restent attachés à la protection sociale de leur pays d’origine, ce qui pose un problème de dumping social quand celle-ci y est beaucoup moins développée. Cependant, la règle édictée par la directive de 1996 (directive 96/71/CE) est que ces salariés détachés doivent suivre les normes de travail du pays d’accueil, pour les conditions de travail notamment, les salaires minimaux en vigueur, de même que pour les droits à congés payés, la limite supérieure au temps de travail et la limite inférieure aux temps de repos. De plus, s’applique le principe du contrôle par le pays d’accueil.

Dans la réalité, ces salariés détachés ne sont pas toujours connus des services du pays d’accueil, les contrôles sont peu fréquents et l’application de la directive reste, dix sept ans après, très limitée. Un détournement est même développé par des « sociétés-boîtes aux lettres » dans les pays aux normes sociales les plus faibles.

Face à ces abus, la Commission européenne a présenté un projet de « directive d’exécution » en mars 2012.
Le projet de directive d’exécution définit ainsi cinq axes de consolidation :

  • préciser la notion de détachement afin de prévenir les abus ;
  • améliorer l’accès à l’information des salariés et des employeurs ;
  • renforcer la coopération administrative et l’assistance mutuelle entre les États membres ;
  • améliorer l’exécution des contrats (défense des droits, chaînes de sous-traitance, responsabilité solidaire et sanctions) ;
  • mettre en place un instrument commun de reconnaissance mutuelle et d’exécution transfrontalière des amendes et des sanctions administratives et faciliter la coopération administrative.

Depuis les discussions sont vives. Le Parlement européen ne s’est mis d’accord qu’à une faible majorité à la Commission des Affaires sociales le 20 juin. De son côté, l’Assemblée nationale vient de publier un rapport très critique sur la question, concluant à l’insuffisance des propositions de la Commission.
Les rapporteurs proposent de mettre en place des outils complémentaires indispensables pour lutter contre la fraude au détachement et préserver les emplois nationaux :

  • renforcer les pouvoirs de contrôle et créer une Agence européenne de contrôle du travail mobile en Europe ;
  • créer une carte du travailleur européen ;
  • mettre en place une liste noire d’entreprises et de prestataires de services indélicats ;
  • améliorer l’arsenal législatif et de contrôle national ;
  • étendre la possibilité de recours aux organisations syndicales nationales ;
  • solliciter auprès de la Commission Européenne un moratoire de toute initiative législative sur le cabotage routier en l’absence d’un renforcement significatif de la législation européenne vu les insuffisances relevées ;
  • proposer à l’Union européenne, au nom du principe de concurrence libre et non faussée, un salaire minimum de référence afin d’harmoniser socialement les conditions de détachement.