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Les clés du social : Remettre l'Europe sociale au cœur du projet européen (2)

Remettre l’Europe sociale au cœur du projet européen (2)

Publié le 18 mai 2019 / Temps de lecture estimé : 4 mn

L’Europe sociale existe, on l’a vu dans un précédent article (http://www.clesdusocial.fr/l-europe-sociale-existe-meme-si-elle-doit-etre-amelioree-dialogue-social-europeen). Mais après de nombreuses années trop libérales de la Commission européenne, face à une crise mondiale qui a entraîné chômage, augmentation des inégalités, déstabilisation des emplois et à de profondes mutations encore en cours aux niveaux technologique, environnemental, etc., les citoyens et salariés ont besoin que l’Europe redéveloppe une politique en faveur des droits sociaux.

Une enquête récente d’Ipsos pour l’Uniopss (Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) montre les attentes des Français envers l’Europe. De son côté, la CES, Confédération européenne des syndicats, a explicité les attentes des salariés pour les élections de ce mois et la prochaine phase de la construction européenne. Et récemment les partenaires sociaux français (CFDT, CFTC, CPME, MEDEF, U2P) ont exprimé leurs attentes économiques, sociales et environnementales par une déclaration dans Le Monde.
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Quelles attentes sociales des Français pour l’élection européenne ?

D’après l’enquête, ciblée surtout sur les questions de protection sociale, les Français attendent beaucoup de l’Europe. En particulier, pour l’avenir :
 80 % souhaitent une harmonisation des systèmes sociaux par le haut, mais pour 60 % c’est un objectif à au moins 10 ans,
 65 % demandent une politique migratoire européenne,
 pour 69 % le rôle de l’UE est essentiel ou important dans la protection des droits sociaux.

Pour l’immédiat, les attentes en termes de priorités touchent l’ensemble des principales questions actuelles :
 37 % : lutter davantage contre le changement climatique,
 36 % : protéger le pouvoir d’achat des consommateurs,
 34 % : améliorer les droits sociaux (droit du travail, protection sociale, système de santé…),
 34 % : protéger les Européens de la menace terroriste,
 31 % : gérer davantage l’arrivée des migrants,
 alors que seuls 11 % demandent à l’UE de protéger davantage les libertés individuelles.

Dans leur esprit, les mesures sociales à prendre doivent chercher à aider plus ceux qui en ont le plus besoin, en premier les retraités modestes (32 %), suivis par ordre décroissant des jeunes et des chômeurs (27 % chacun), des SDF (26 %), des handicapés (23 %) et des ruraux (21 %).

Comment le réaliser ? Curieusement, alors que les attentes sont fortes, les réponses se partagent entre ceux qui souhaitent un renforcement du rôle de l’UE et ceux qui comptent sur la souveraineté de chaque État. Méconnaissance des compétences des uns et des autres ? Débat entre fédéralisme et subsidiarité ? Évaluation désabusée de la situation actuelle de l’UE ? Sans doute un peu de tout !

Pour une Europe force de progrès social

 Une Europe plus juste

De son côté, la CES, au nom de l’ensemble des syndicats d’Europe, insiste dans son manifeste sur la nécessité de reconstruire le modèle social européen, par une mise en œuvre complète du socle européen des droits sociaux qui a été adopté à l’automne 2017, y compris dans la gestion des migrations et leur introduction dans les relations commerciales mondialisées.

Cela comporte, pour les syndicats, une gestion des transitions vers une économie bas carbone et numérique avec l’objectif que personne ne reste sur la touche. Cela inclut :

  • l’accompagnement des travailleurs qui subissent des perturbations dans leur emploi en lien avec ces transitions,
  • la recherche d’emplois de qualité,
  • des garanties pour ceux qui ont un emploi précaire ou atypique (salaire, protection sociale, égalité des droits, y compris les droits de se syndiquer et de négocier collectivement).

Pour cela, la CES revendique de nouvelles politiques économique et industrielle, où compétitivité et justice sociale soient liées, où des négociations collectives aboutissent à des hausses de salaires et à de meilleures conditions de travail. « Un travail de la même valeur devrait être payé de la même manière partout en Europe, dans tous les secteurs, aussi bien pour les femmes que pour les hommes. », en commençant par un salaire minimum dans tous les pays de l’UE (6 n’en ont pas et avec d’énormes différences entre les 286 € de Bulgarie et les 2 071 € du Luxembourg).

Ce modèle social doit développer la participation démocratique, tant dans la société que sur le lieu de travail, meilleur rempart à la montée des extrémismes qui fragilisent la démocratie ; l’information et la consultation des travailleurs ainsi que la participation aux changements sont un droit, le dialogue social et la négociation sont des outils essentiels de garantie démocratique.

 Une Europe sociale, économique et environnementale forte

C’est l’engagement des partenaires sociaux français signataires. Ils lui assignent comme objectif de réduire les inégalités entre les citoyens et entre les territoires, en garantissant un développement économique et social équilibré et durable et, essentiel, en mettant en œuvre par des mesures concrètes le socle européen des droits sociaux pour les travailleurs et le dialogue social européen, avec une meilleure lisibilité et efficacité des financements européens et un environnement économique et social loyal et stable.

À leur tour ils insistent sur la nécessité que l’’Europe relève les enjeux des transitions écologiques et technologiques par des politiques européennes ambitieuses, équilibrées, coordonnées et équitables.

L’Europe est la région du monde où les systèmes sociaux sont les plus développés. Pour que ce modèle social soit durable, face aux défis géopolitiques et à la mondialisation, l’Europe doit être forte pour assurer son autonomie et son indépendance, face aux États-Unis et à la Chine.

Un appel au vote

Par les réponses à l’enquête et à ces prises de position, on voit l’ampleur des attentes pour une Europe sociale bien plus forte, nécessaire pour sortir de la désillusion et de sa faiblesse actuelles. Cela montre aussi combien il y a à faire pour répondre aux défis de notre période au profit de tous.

Aussi la CES comme les partenaires sociaux français appellent les citoyens européens comme français à participer au vote lors de ces élections européennes du 23 au 26 mai, premier pas indispensable pour peser sur la mise de l’Europe sociale au cœur de la construction européenne.
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Sources