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Les clés du social : Accord sur les fins de carrière à la SNCF : un accord controversé

Accord sur les fins de carrière à la SNCF : un accord controversé

Publié le 8 juin 2024 / Temps de lecture estimé : 4 mn

Accord historique pour certains, remise en cause de la réforme des retraites pour d’autres, l’accord signé par les quatre organisations syndicales représentatives et la direction de la SNCF le 22 avril 2024 améliore largement les conditions de fin de carrière des agents de l’entreprise. Au-delà des possibilités de cessation d’activité anticipée, il donne aux seniors les moyens de préparer leur départ à la retraite. Que dit l’accord ?

Préparation à la fin de carrière
L’accord prévoit pour les cheminots un entretien de dernière partie de carrière qui devra avoir lieu à partir de 50 ans ou 4 ans avant l’ouverture des droits à la retraite. L’objectif est de préparer à la transition vers la retraite en mobilisant, si besoin, différents acteurs de l’entreprise pour aider le salarié. Pour certains, il pourrait être envisagé un aménagement du poste du salarié.

Le salarié recevra dans l’année des 4 ans avant l’ouverture des droits une plaquette présentant les différentes possibilités de fin de carrière dont il peut disposer.

Les dispositifs de fins de carrière

L’accord actualise des dispositifs déjà anciens, qui s’étaient révélés peu attractifs jusqu’ici mais qui pourraient maintenant être très incitatifs.

  • La cessation anticipée d’activité (CAA)
    3 dispositifs de CAA sont proposés aux salariés, tous comprenant deux périodes distinctes de durée égale : une première période à temps plein suivie d’une seconde en cessation d’activité.
    • Le premier dispositif appelé « CAA fixe groupée » peut durer jusqu’à 18 mois. Le salarié est rémunéré à 75 % sur les deux périodes. Pour en bénéficier, il faut 15 années d’ancienneté.
    • Le second, le « CAA pénibilité » est d’une durée qui peut aller jusqu’à 24 moins si le salarié a occupé un poste pénible au moins 20 ans et jusqu’à 30 mois pour 25 ans de postes pénibles. La rémunération est de 100 % sur la période travaillée et 75 % sur la deuxième, non travaillée.
    • Le troisième, le « CAA ASCT/ADC », destiné aux agents de conduite et contrôleurs, a les mêmes conditions que le « CAA pénibilité » mais avec des facilités d’accès (durée de pénibilité inférieure et durée du dispositif pouvant aller jusqu’à 30 mois et même 36 mois pour les contractuels).

Ces dispositifs permettent d’anticiper la fin de l’activité de 6 à 18 mois selon les cas atténuant de fait en partie les effets de la réforme des retraites de l’an passé.

  • Le temps partiel de fin de carrière (TPFC)
    L’accord prévoit une réduction progressive de la durée du travail de 50 à 80 % sur une période 12 à 24 mois (36 mois si pénibilité d’au moins 20 ans). La rémunération du salarié est calculée au prorata du temps effectué majorée de 10 %.
  • Repositionnement des salariés en poste pénible
    Les salariés exerçant des métiers pénibles depuis au moins 20 ans pourront être repositionnés sur des postes qui le sont moins. Ils bénéficieront d’une indemnité compensant les pertes de primes liées au poste pénible occupé.
  • Amélioration des rémunérations en fin de carrière
    La SNCF crée un échelon d’ancienneté supplémentaire et fait évoluer la grille salariale en créant un niveau supplémentaire pour les salariés statutaires et sous forme d’une augmentation individuelle à 60 ans pour les contractuels.

Des réactions gouvernementales sévères

Au gouvernement qui y voit une remise en cause de la réforme des retraites et qui plus est venant d’une entreprise appartenant à l’État, l’accord passe mal. Le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Lemaire a déclaré que l’accord menace « l’équilibre de la SNCF » tandis que Patrice Vergriete, ministre des Transports, souhaite que l’accord soit financé en interne par des gains de productivité.

Un accord salué par les syndicats

La CGT Cheminots considère que cet accord est le « fruit des mobilisations et actions des cheminots à l’appel de la CGT ». Pour Sud-Rail « les avancées de cet accord permettent de compenser en partie la réforme de retraites » tandis que l’UNSA et la CFDT de la SNCF, saluant elles aussi cet accord, ont répondu aux polémiques sur le financement de l’accord en relativisant son impact.

Marylise Léon secrétaire générale de la CFDT a déclaré que cela participait « à la construction d’un nouveau cadre social pour la SNCF à la suite des grandes réformes qu’elle a subies » et son homologue de la CGT Sophie Binet que « c’est une très belle victoire ».



N’en doutons pas, cet accord, qui a précédé celui sur les primes durant les Jeux Olympiques, est de nature à préserver une certaine « paix sociale » cet été dans un secteur particulièrement sensible. Les syndicats ont su utiliser efficacement leur rapport de force au risque tout de même d’être soit enviés ou à l’inverse mal compris par d’autres salariés qui eux n’en bénéficient pas…

Et si, finalement, cet accord était le résultat d’une véritable négociation entre partenaires sociaux soucieux de faire en sorte que la transition vers la retraite s’effectue dans de bonnes conditions avec des perspectives positives à la fois pour l’entreprise et les salariés. On aurait aimé, sans peut-être atteindre des conditions similaires qui ne sont pas réalisables dans toutes les entreprises, que le patronat fasse preuve du même état d’esprit d’ouverture pour traiter réellement la question du travail et des conditions d’emploi des séniors dans la négociation sur le Pacte de la vie au travail.